Belgian pétaudière !

Le gouvernement fédéral belge, accouché aux forceps et tard venu - dix mois tout de même!, est un mouton à cinq pattes aussi peu viable qu'ingérable. Pour le rapport de force : trois petites pattes francophones et deux pattes flamandes bien en chair. Pentapode du pouvoir exécutif aussi asymétrique qu'indépendant, aussi asynchrone qu'antagoniste. Antagoniste sur tous les plans : linguistique, idéologique et humain puisque les élites qui tentent de gouverner l’Ubuland du nord, dans lequel même le dysfonctionnement est fonctionnel, n'ont de cesse de s'étriper, se bouffer la gueule, se tirer dans les pattes. Il n'est qu'à voir ce qui se passe en RDC où un conflit public est ouvert entre Karel De Gucht, ministre (flamand) des Affaires étrangères et Charles Michel, héritier et ministre (francophone) de la Coopération au développement. Et pendant ce joyeux étripage symbolique, les Congolais vivent une tragédie, bien réelle, à l'est du pays. Tragédie, continuité historique oblige, inscrite même dans le concept de postcolonie, à savoir des « sociétés récemment sorties de l’expérience que fut la colonisation, celle-ci devant être considérée comme une relation de violence par excellence... » (Achille Mbembe). La politique de migration et d'asile est à l'avenant. La flamande Annemie Turtelboom, notre Hortefeux à nous, pour qui l'enfermement de mineurs ne viole pas la Convention des droits de l'Enfant (sic), y expose son savoir faire, où le médiocre se marrie au tendancieux, sous les quolibets stériles du PS et d'Ecolo (gauche francophone), tout cela au détriment des sans papier bien entendu. Et pour couronner l'ensemble, on a à l'avant poste Yves Leterme, Premier ministre, et donc chef d'Etat en Belgique, qui est plus gris et plus quelconque que ses costards, qui est aussi incompétent que ruiné... Le gouvernement fédéral, à la lumière de ce qui précède, n’est qu’un machin qui navigue à vue, un bidule sans âme et sans efficacité, même si la gestion dans l’urgence de la crise financière et bancaire a pu donner le change pendant quelques jours - il fallait sauver les soldats Fortis et Dexia ! Tandis que Dexia secoure financièrement les colonies en territoires occupés... Le belge, lui, belle au bois dormant, sans bois et sans beauté, est un éternel endormi qui s' accommode de tout ; vous n'imaginez pas à quel point il s'en tamponne des frasques de l'élite ! Tout en bas de l'échelle, l'Indigène belgicain, qu'il soit d'origine marocaine, turque ou congolaise, lui, hésite entre l'implosion identitaire (voie royale vers l'asile ou la prison), l'exil intérieur dans les territoires éthérés, et sous contrôle, du religieux ou la fuite en avant du rhobzisme... Quant aux syndicats - au pays, qui compte le plus haut taux de syndicalisation au monde et où l'on a inventé la grève générale !-, ils hésitent entre état comateux et léthargie. Le francophone, quant à lui, est l'éternel mari dostoïevskien, le cocu magnifique du grand marchandage électoral, puisque les néerlandophones du pays, à savoir 63% de la population, se sont attribués les postes-clés : Premier ministre, ministres des affaires étrangères, de l'intérieur, de la défense, de la justice, de la politique de migration et d'asile... Dix mois pour cela ! Le « compromis » et la « coalition » gouvernementale, vaches sacrées d'ici, sont le mal belge qui affecte le pouvoir à tous les niveaux. Ce mal résulte du vote à la proportionnelle, car il n'est pas la panacée dont rêvent certains Français, qui garantit aux partis traditionnels la pérennité de leur présence au gouvernement, qu'ils gagnent ou qu'ils perdent. La « particratie »* est l'autre mal. Elle sévit au sein même du gouvernement, puisque les présidents de parti sont les « belles-mères » qui tirent les ficelles de celui-ci. Par exemple, ce sont ces dernières qui désignent les ministres, leurs ministres. Ces ministres, dociles à la discipline de parti, leurs sont fidèles bien plus qu'ils ne le sont au gouvernement. Bien sûr, pour ne fâcher personne, le gâteau est bien partagé, chaque parti de la coalition a son « vice-premier ministre », le plus souvent un vieux routier du politique, qui fait office de concierge auprès de la belle-mère. On voit donc que la politique belge est une vaste histoire de famille ; où la famille est en état de décomposition avancée.... Et, dans un contexte pareil, on voudrait que j'ai une identité pacifiée !

* Chacun des partis traditionnels correspond à un pilier, c'est-à-dire à une force verticale qui traverse de part en part le corps social, via des mutuelles, des banques, des syndicats, des journaux, des entreprises publiques en tous genres (intercommunales, holdings, compagnies d'assurance...), des unions professionnelles...


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