De la race ou du retour du refoulé...

«Pour de vastes fractions de l'espèce humaine et pendant des dizaines de millénaires, cette notion paraît être totalement absente. L'humanité cesse aux frontières de la tribu, du groupe linguistique, parfois même du village ; à tel point qu'un grand nombre de populations dites primitives se désignent d'un nom qui signifie les "hommes", impliquant ainsi que les autres tribus, groupes ou villages ne participent pas des vertus ­ ou même de la nature ­ humaines, mais sont tout au plus composés de "mauvais", de "méchants", de "singes de la terre" ou "d'oeufs de pou". » (Lévi-Strauss)

Nous l’avions écrit derrière le postracial, dont on nous a gavé pendant la campagne présidentielle américaine, il fallait surtout y voir un crypto-racial, car dénégation et euphémisme, en matière sociale, sont souvent le signe du pire… Et c'est peu de dire que derrière « la France qui salue très majoritairement la victoire d’Obama peut cacher celle qui a amené Le Pen au deuxième tour de la présidentielle en 2002…». Le racisme et la race, en Europe comme en Amérique, il est vrai, n’avaient jamais vraiment quitté les lieux. Ils ont tour à tour pris la forme culturelle du « différentialisme », celle plus fréquentable sous sa caution scientifique d' « ethnie » et, enfin, la forme résiduelle d'un impensé social, sous le vocable tendancieux et controversé de « de souche ». Et voici qu'aujourd'hui, la « race », sortant de sa boite de Pandore, s'ébroue, s'émancipe, se décomplexe une fois pour toute et lance à la cantonnade : laissons les morts enterrer les morts. Elle s’annonce telle qu’en elle-même, sans fioriture aucune, avec aplomb et verbe haut, assumant héroïquement sa bêtise à front de taureau… Son retour, tel Ulysse s'en revenant à Ithaque, s'est fait par le biais du philosophe de comptoir du PAF, empereur de la mimilitude, savonarole des petits blancs à la dérive : Eric Zemmour. On comprend aisément l'usage qui sera fait de la question raciale par les instances politiques d'aujourd'hui. Quelle meilleure manière d’escamoter la question sociale, sans règler le moins du monde la question raciale, quitte à susciter tout à la fois le ressentiment et la mauvaise conscience... Devinez sur qui ? Et qui sont, en dernière analyse, les vrais gagnants de ce charmant dispositif ?

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Rien à faire de Zemmour et de ceux, complices, qui l'invitent. Mais que dire de sociologues qui emploient le mot "race" dans leurs travaux. Par exemple, Jean-Claude Kaufmann, "Aucune race, aucun âge, aucune forme ne sont interdits" (sur les plages). (Corpos de femmes, regards d'hommes, Nathan, 2000, p. 186. Consternant, non ?

Anonyme a dit…

Effectivement Zemmour, c'est la partie immergée de l'iceberg...
Il le sait et il bouffonne utile !

Entreprise Nettoyage a dit…

Je ne l'aime vraiment pas ce Zemmour!
entreprise nettoyage