Bamboozled*

La vie politique française est marquée par les temps forts que sont l’élection présidentielle et les élections législatives qui, depuis l’inversion du calendrier électoral du 21 décembre 2000, se suivent de quelques semaines.

Chaque jour qui passe nous rapproche donc de ces deux scrutins qui vont décider, pour les cinq années à venir, de l’orientation politique du pays.

Les rapports de force existant ont d’ores et déjà tronqué la donne. Il est quasiment certain que l’élection présidentielle sera remportée par un candidat issu d’un des deux grands partis ayant privatisé l’exercice du pouvoir exécutif depuis plus de trente ans : le PS et l’UMP.

Les élections législatives, en lui conférant une solide majorité au palais Bourbon, donneront vraisemblablement toute latitude au vainqueur de la présidentielle pour mener à bien la majeure partie de son programme. Au sein de l’Assemblée Nationale, censée représenter fidèlement le paysage politique français, peu de place sera faite aux représentants des minorités, devenant on ne peut plus invisibles, au fur et à mesure que l’on se rapproche des travées du pouvoir.

Un combat trop salissant…

Si le conservatisme, voire la discrimination, caractérisant la désignation de candidat au sein des formations politiques traditionnelles, est l’explication principale que l’on peut donner de ce phénomène, il en est une autre, occultée par les personnes intéressées au premier chef par ce déni démocratique, et malheureusement mise sous le boisseau : le déficit qualitatif des soi-disant représentants de la communauté noire, partie intégrante du corps social français et l’illisibilité de leur engagement pour la défense des intérêts de cette même communauté.

La crainte d’être catalogué comme trop noir, trop revendicatif voire agressif, le carriérisme et l’individualisme, entrainent une volonté, affichée par la quasi-totalité des politiciens noirs, de rester ostensiblement à la lisière du champ de bataille pour une reconnaissance politique totale du citoyen de couleur. A la réelle revendication, au concept de lutte et la violence symbolique qui s’y rattachent, s’est substituée ce qu’il convient d’appeler la revendication par l’aumône.

Tout doit se faire selon les normes, il faut revendiquer mais pas trop, ni tout le temps, comme s’il ne fallait pas brusquer un système pourtant structurellement raciste et discriminatoire.

La volonté de ne pas reconnaitre la France telle qu’elle est en réalité, caractéristique de ceux qui tiennent les rênes du pouvoir, ne peut atténuer les critiques que nous nous devons d’apporter au positionnement frileux, le plus souvent empreint de lâcheté et de renoncement, adopté par certains.

La « négritude » n’est perçue par les plus emblématiques de nos représentants que comme un argument marketing, devant convaincre les maitres de la place de se servir de leur image, afin de rallier les votes de la minorité à leur personne ou à leur parti.

De fait, elle n’est bien souvent qu’un argument à faire valoir dans l’édification d’un destin personnel, bien éloigné des désirs et des besoins de citoyens scrutant le panorama politique, à la recherche de représentants qui leur ressembleraient et les défendraient, non seulement sur le plan des discriminations raciales (à l'embauche, au logement, etc), mais aussi et surtout, sur le plan des aspirations sociétales.

Petit voyage au pays de l’arrivisme, du dogme du « moi, je », du manque de constance et de l’absence totale de responsabilité…

La fille spirituelle du diable…

Nicolas Sarkozy, maître-ès fourberies, nous a joué à son accession au pouvoir, un air de mandoline en nommant Ramatoulaye Yade (qui, pour les besoins de la (sa) cause, préfère se faire prénommer Rama).
Dans le rôle de « sois pas trop noire et mange là ! », elle a réussi à se distinguer comme personne.

Sénégalaise d’origine, elle n’a pas moufté lors de la lecture du trop fameux et paternaliste discours de Dakar, présentant la vision de l’homme noir selon les critères sarkozystes. Benjamine et grande gueule officielle du gouvernement, de 2007 à 2010, elle n’a jamais perdu une occasion de célébrer la France des Lumières, s’abstenant ostensiblement de vitupérer celle des ténèbres, qui sur bien des aspects a été celle de Nicolas Sarkozy.

Se servant de sa couleur comme d’autre se servent de leur diplôme, elle n’a eu de cesse de la mettre en avant lorsque les évènements ne collaient pas avec les plans de carrière que son ambition lui faisait caresser.

Il n’est certes pas déplacé d’être ambitieux en politique, cela est plutôt conseillé, mais appeler à la solidarité de couleur après avoir pactisé avec le diable Sarkozy, n’est pas la démonstration d’une volonté inflexible de défense du citoyen noir lambda.

Son parcours politique est à cette enseigne, révélateur et instructif à plus d’un titre.

Elle a tapé à toutes les portes, la Ramatoulaye, se révélant ainsi prête à manger à tous les râteliers et déterminée à accorder ses faveurs à celui qui lui offrirait ce qu’elle estime convenable selon le prisme déformant de son ambition.

Mais de tout ceci, quelle plus-value peut en tirer la communauté noire ?
Aucune, et sauf à concevoir la politique comme une foire aux ambitieux, Ramatoulaye Yade ne fait pas de politique.

Sa pensée politique, qu’elle expose d’ailleurs fréquemment dans les médias, peut se résumer à un chiffre : 0.

Approchée dernièrement par son père spirituel Nicolas Sarkozy, chef d’une droite nostalgique de la hiérarchie des races, pour soutenir sa candidature, elle réserve sa réponse. Il est fort à parier qu’elle le rejoindra, si elle estime possible d’en tirer quelques bénéfices substantiels.
Bel exemple de cohérence, bel exemple de fidélité à ses idées !

Empêtrée dans les remous occasionnés par une affaire de plagiat et de contestation de sa domiciliation à Colombes dans le cadre de sa candidature aux législatives, elle réaffirme son engagement pour la défense des minorités : « Je veux travailler pour les minorités visibles comme invisibles, pour les petits blancs qu'on ne voit pas au JT de TF1. Comme l'a dit Condi Rice, je serai fière quand je serai un modèle pour les vieux hommes blancs ».

Dans cette phrase affleure la véritable nature de sa personne. Complexée, Ramatoulaye Yade ne cherche évidemment pas à assumer ce qu’elle est : une femme noire évoluant dans un milieu blanc. De fait, celle qui est entrée en politique non pas pour servir, mais pour se servir ne sera jamais une efficace porte-parole de la communauté.

Ne mélangeant pas les torchons et les serviettes, elle ne s'est jamais trompée de priorité et n'a jamais abusé ceux qui, selon son agenda, elle fait mine de considérer comme les siens.

Femme pressée, Ramatoulaye est bien trop occupée à défendre et mettre en scène sa propre personne.
Au sortir d'un dîner organisé par le Congressional Black Caucus le 27 septembre 2009, auquel elle avait participé uniquement pour être photographiée aux cotés de Barack Obama, elle déclare amère, n'ayant pas été remarqué par le président des Etats-Unis: " Il n'y a que des noirs ici [...] ce n'est pas ma conception de la politique. "

Rencontrer essentiellement des noirs lorsqu'on est invité par des parlementaires Afro-américains est logique, mais pas pour Ramatoulaye Yade. Ne pas se reconnaître dans une manifestation de la communauté noire, même si américaine, est logique pour Ramatoulaye Yade, cherchez l'erreur...

Ce cher frère Patrick…

Ramatoulaye Yade, arriviste patentée, n’est pas la seule à arpenter les voies de l’engagement politique cosmétique et intéressé.

Patrick Lozès, ancien président du CRAN, le fameux Conseil Représentatif des Arrivistes Noirs de France, n’en manque pas, de cran.

Se présenter à l’élection présidentielle en ayant pour seul programme la volonté de se faire mousser, ne manque pas de panache !

Ce diplômé en pharmacie, fils de ministre, n’ayant pas eu peur de s’inventer une vie de banlieusard désargenté, pour crédibiliser son image du noir « qui-vient-de-loin-mais-qui-s’en-est-sorti », est le représentant politique de la communauté le plus chafouin.

Ses dents rayant le parquet n’ont échappé à personne, son absence de représentativité au sein des milieux modestes et défavorisés de la communauté, c’est-à-dire la plus grande partie de celle-ci, n’a échappé qu’à lui-même.
Il eut eu une chance de faire 1% des voix si les noirs en France étaient tous des petits black-geois parisiens (pour reprendre le néologisme du magazine ELLE). Malheureusement pour lui, ce n’est pas le cas...

De son passage à la tête du CRAN, ne restera que le souvenir d’un homme sautant sur la moindre controverse intéressant la communauté, pour se répandre, tel un robinet d’eau tiède aux micros de médias trop heureux de donner l’illusion d’octroyer un temps de parole aux noirs de France, laissant ce nègre de salon, s’écouter pérorer en séparant bien les syllabes, montrant ainsi sa maitrise parfaite de la langue de Molière.

Sa devise, « Plus lisse que moi, tu meurs! », aux antipodes des besoins de représentativité du noir de France, lui a permis de développer de solides inimitiés au sein de la partie de la population, qu’un beau matin frappé par la foudre, il s’est cru devoir représenter à l’élection présidentielle.

Mais voilà, cet homme, seul avec deux ou trois amis à croire en sa destinée nationale, ne décolle pas dans les sondages.

Il doit sans doute être le premier candidat de l’histoire à figurer dans les enquêtes d'opinion grâce à des chiffres négatifs, le seul pour lequel est mesurée la non-intention de vote...

Sa dernière sortie, concernant la polémique créé par l’article de Elle, ne risque pas de crédibiliser sa candidature auprès du public qu’il vise tout en soutenant le contraire (Il se présente "modestement" comme le candidat de l’égalité).

Dans une interview accordée au site Atlantico, il démontre qu’il n’a rien perdu de sa souplesse dorsale. Courbé comme il se doit, il affirme : « Vous savez, je ne suis pas noir du soir au matin ! Je ne suis pas noir tout le temps ! J’aimerais que les uns et les autres sortent de cela. Sinon, nous allons créer des générations de personnes qui pourraient croire que parce qu’elles sont noires, elles n’ont aucune chance de réussite dans la société française ».

Patrick Lozès est donc le seul noir de France arrivant à changer de couleur selon le moment de la journée, et vraisemblablement selon l’interlocuteur ! Noir, lorsqu’il s’adresse à la communauté, blanc, lorsqu’il s’adresse à ceux qu’il ne peut s'empêcher d'interpeller avec une obséquiosité marquée. Ce double discours le disqualifiant et le ridiculisant est l’illustration parfaite de la théorie de la revendication par l’aumône…

Plagiat, politique et mégalomanie…

Dans le domaine du double discours, le cas de Calixthe Beyala , « La photocopieuse de Douala », référence à sa propension à dupliquer pour son compte les œuvres littéraires d’autrui, est plus qu’instructif.(1)

Celle que le grand opposant et écrivain camerounais Mongo Béti décrivait ainsi: « De Calixthe Beyala, je dis que c’est l’amie de Chirac, C’est l’amie de la droite. C’est la fille qui veut arriver. Elle est opportuniste et arriviste […] c’est cet arrivisme qui fait qu’elle se met à faire du plagiat […] C’est son mode de défense à propos des plagiats qui m’a révulsé, parce qu’elle dit quelque part que « tout le monde fait ça ». Or moi je n’ai jamais plagié quelqu’un. […] Il ne faut pas dire tout le monde fait ça  »(2), est aujourd’hui à la tête d’un mouvement (association, parti politique ?) ayant vocation à représenter politiquement les noirs de France, le MAF.(3).

On serait en droit de souhaiter meilleure ambassadrice...

Voilà qu’une des figures emblématiques du militantisme de convenance, qui naguère sur un plateau télé, s’offusquait de ce que Thierry Ardisson lui rappelle ses origines africaines(4), s'est muée soudainement en passionaria de la communauté afro-française et mieux même, en inlassable pourfendeuse du néocolonialisme (crise ivoirienne et l’intervention de l’OTAN en Libye).

C’est avec difficulté que les plus sérieux ont retenu une envie de s’esclaffer, au visionnage de ses interventions télévisuelles enflammées ou à la lecture de ses tribunes ampoulées, complaisamment reproduites par une presse africaine frappée d’amnésie ou bien mal informée…

Car il fut un temps où, Beyala-la-panafricaine se souciait plus de briguer le poste de secrétaire de la Francophonie (Excroissance culturelle naturelle de la Françafrique, chargée de pérenniser la colonisation par d’autres moyens), que du sort des africains, voire des africains-français, son nouveau cheval de bataille.
Trahie par l'ami Sarkozy, qui naguère lui avait permis d’être décorée de la légion d’honneur sur son contingent personnel, elle n’obtint pas le poste tant convoité. Furieuse, la vengeance en ligne de mire, elle s’est inventée ex-nihilo un destin politique, en usant de procédés malhonnêtes, fidèle à ses habitudes.

Adepte du plagiat littéraire, elle s’est mise avec la même application au plagiat politique, en récupérant de manière éhontée un mouvement, créé par de jeunes franco-ivoiriens en réponse à l’intervention de la Force Licorne lors des manifestations du printemps dernier. Camerounaise de naissance, donc marquée par les pratiques politiques de l’inénarrable et inoxydable autocrate Paul Biya (à propos de la réélection truquée duquel elle ne s’est pas répandue avec autant de verve et de virulence qu’elle a pu le faire au sujet de la Côte d’Ivoire), elle a mis en place une structure, digne du parti unique camerounais, dans laquelle, elle et elle seule, du haut de son insondable incompétence en matière politique, garde la haute-main sur les décisions stratégiques.

Résultat, la première exhortation du MAF a été d’appeler au soutien de François Hollande lors des primaires socialistes. Voler au secours d’un homme ayant publiquement endossé, en conformité avec la ligne de son parti, l’intervention française en Côte d’Ivoire, est ce que l’on appelle un coup de maître...
Ou une incohérence notable, de la part de celle se présentant volontiers, soutien d’un Laurent Gabgbo croupissant derrière les barreaux de la CPI, grâce au gouvernement français et avec la bénédiction du Parti Socialiste...

Le MAF, sous la férule de Beyala, s’inscrit d’ores et déjà dans la mouvance de ces mouvements faussement communautaires, mais réels siphons à voix pour le PS, comme le furent en leur temps SOS-Racisme ou Les Ni-Putes, Ni-Soumises.
A tout prendre, une formation politique, une vraie, eut été une avancée symbolique, non pas une énième association communautaire.

Cette arme brandie au bénéfice d’une seule personne, qui, venu le moment des élections, lancerait des mots d’ordre de ralliement à une formation politique désireuse de faire le plein de voix colorées, et par suite négocierait un strapontin plus ou moins confortable, plus ou moins proche du pouvoir. Aventurisme, incompétence et malhonnêteté intellectuelle n’ont jamais que desservi la communauté, et ce sont malheureusement les traits principaux du « Beyalisme »…

Tonton Kofi…

Il faut cependant reconnaître qu’en termes d’exemple, les personnalités décrites précédemment ont pu s’abreuver à la meilleure des sources.

Nous visons là, celle du franco-togolais Kofi Yamgnane, véritable multiprise du paysage politique noir de France.

Telle la girouette de la citation d’Edgar Faure, Kofi Yamgnane ne bouge pas, le vent se chargeant de l’emmener là où son intérêt supposé le lui commande.

Figure de la diversité à la sauce socialiste, ce brillant ingénieur des mines, fit en son temps la fierté d'une communauté amnésique, ayant oublié que la France avait déjà compté des ministres noirs (Houphouët-Boigny et Senghor notamment, au cours des années cinquante).

Destiné à sa naissance par les Parques au seul ministère semblant à l’époque pouvoir l’accueillir, il fut bombardé au poste de secrétaire d'État chargé de l'Intégration auprès du ministre des affaires sociales et de l'intégration de 1991 à 1993. Sa carrière au gouvernement ne dura que le temps pour lui d’inaugurer des équipements publics et de constater, que, même sous un pouvoir socialiste, les politiques d’intégration se déclinent quasi exclusivement en rénovation de ghettos et autres espaces ségrégés.

Un vent plus chaud l’aiguilla en 2010 vers sa terre natale, le Togo, alors que sa carrière politique française s’enfonçait dans le néant.

Rejouant l’arrivée du civilisateur venu d’Occident, il tenta de briguer le poste de Président de la République. Une fin de non-recevoir fut donnée à ses offres de service.

Français ou togolais il eut fallu choisir plus tôt, et certainement pas par défaut !

De retour en France, il réapparut au coin du bois socialiste, pour jouer les M. Afrique du candidat Hollande. Las ! Il se rendra compte très rapidement que le PS, toujours paternaliste, aime les grandes envolées lyriques sur les droits de l’homme et le développement des pays du sud, mais n’est toujours pas disposé à mettre en œuvre ses professions de foi africaine.

Lui qui prônait devant ses camarades socialistes, le 25 janvier dernier, au cours d’une réunion se tenant au siège de campagne de François Hollande, la disparition des bases militaires françaises en Afrique, la suppression du ministère de la Coopération, de la cellule Afrique de l’Elysée et la refonte de l’AFD, a été gentiment renvoyé dans les cordes.

Sa proposition d’abandonner le Franc CFA a été éludée sans aucune autre forme de procès.
La rupture oui, mais seulement dans les propos.

Kofi Yamgnane, vieux routier de la politique hexagonale, aurait dû savoir que ses camarades socialistes restent paternalistes dans l’âme et ne sont nullement prêts à remettre en question le paradigme gaullien françafricain, pendant nécessaire de la grandeur de la France.

Salonnard ambitieux ou contestataire véritable?

Le constat s’imposant aujourd’hui pour le citoyen français noir, est le manque de cohérence de ceux qui, pour de bonnes raisons (ou de mauvaises), décident d’embrasser la carrière politique. L'absence de ce courage, devant amener ces derniers à affronter frontalement le système, ou du moins lorsque faisant partie de ce dernier, à ne transiger sur aucuns des points essentiels, est une donnée constante.

Malcolm X, dans une société marquée par l’esclavage, avait popularisé une classification binaire, destinée à rendre compte de la réalité de la lutte des afro-américains : celle du house negro et du field negro (le nègre de maison et le nègre des champs). Le premier, noir et se sentant plus blanc que son maitre, était prêt à toutes les veuleries et compromissions, pour se conformer à la place de simple objet que la raciste société américaine lui réservait. Le second, révolté et prêt à tout pour faire respecter sa dignité d’homme, ne craignait pas de combattre ouvertement le système ségrégationniste.

En France de semblables caractérisations, sont à transposer et à adapter. Au nègre de maison (house negro) nous substituerons le nègre de salon, littérateur hors pair, blablateur impénitent, manieur de concepts tous aussi fumeux les uns que les autres, prêt à tout pour se fondre dans le moule du noir revendicatif de façade.

Il n’a de surcroît qu’une seule envie : se repaître des épluchures que le système de domination en vigueur lui laissera déguster dans les arrière-cuisines. Le même n’hésitera pas un seul instant à se désolidariser de sa communauté pour se blanchir (symboliquement s’entend).

A son opposé, figure le nègre de conviction, avatar français du nègre des champs (field negro), conscient du chemin à parcourir pour voir sa condition égaler en tout point celle de la majorité, et solidaire, quel qu’en soit le prix à payer, de sa communauté.

Ce nègre là, malheureusement, n’a eu que trop rarement l’occasion de labourer le champ politique, laissant le nègre de salon truster plateaux télé et émissions grand public.

Le temps faisant son œuvre, l’édification d’un mouvement politique, représentant les citoyens noirs de ce pays, non pas en tant que noirs, mais en tant que citoyen en butte, à des degrés divers, au racisme structurel, s’imposera comme une évidence, une conscience de classe commençant à émerger.

La communauté de couleur n’est certes pas un dénominateur suffisant, les quelques exemples évoqués plus haut le démontrent, mais il semble évident que se rapproche le moment de vérité, ce moment de l’histoire politique française où des citoyens noirs s’organiseront pour assurer une meilleure défense de leurs intérêts catégoriels, sans pour autant renier leurs principes ni s'opposer à ceux de la république, à l’inverse de la majorité de ceux qui, aujourd’hui, prétendent les représenter.

Faisant fi d’objections de principes ne visant qu’à maintenir tout une partie de la population dans le brouillard politique, nous sommes prêts à y participer en y apportant nos forces et nos compétences.
A ceux qui se proposent de voter Jean-Marine Le Pen à la présidentielle, nous disons qu'ils se trompent.
A ceux qui se proposent de voter Jean-Marine Le Pen à la présidentielle, nous disons que l’implication dans le jeu démocratique est plus forte que tous les votes sanctions, qui, dénués de toutes réflexions, analyses et stratégies politiques dignes de ce nom, ne sont d’aucun gain.

Ainsi que le disait un grand homme, dont le souvenir toujours vivace reste cher à nos coeurs: "Certains Noirs ont peur et ils préfèrent s’inféoder aux Blancs. Ils faut les dénoncer, il faut les combattre. Nous devons être fiers d’être Noirs. Souvenez-vous, il y a beaucoup de ces hommes politiques qui ne pensent aux Noirs qu'à la veille des élections. Nous devrons être Noirs avec les Noirs, le jour comme la nuit".(5)

Condamnation définitive du positionnement de M. Lozès, cette exhortation du grand Thomas Sankara est une profession de foi qui guide notre engagement, passé, présent et futur. Le temps des illusions étant bien derrière nous, faisons place à celui de la construction.

Ahouansou Séyivé


* Littéralement: mystifié, embobiné. Hommage au film éponyme de Spike Lee
(1) T.G.I Paris 7 mai 1996 Condamnation de Mme Beyala pour contrefaçon (plagiat) de l'ouvrage M. Buten "Quand j'avais cinq ans je m'ai tué". Mme Beyala ne fait pas appel.
(2) Extrait tiré de "Mongo Béti parle" d'Ambroise Kom. Editions Bayreuth African Studies 2002, p.132-133.
(3) MAF (Mouvement des Africains-français).
(4) Emission "Tout le monde en parle" du 26 février 2005.
(5) Thomas Sankara, discours prononcé en hommage à Che Guévara, à Ouagadougou, le 8 octobre 1987, soit une semaine avant son assassinat par l'actuel président du Burkina-Faso, grand ami de la France, Blaise Compaoré.

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