31 Décembre 406 : Des barbares émigrent massivement en Gaule, pour s'y établir...


Près de 500 000 immigrés, imaginez !

En une nuit ! 500 000…

De quoi faire chevroter Besson pour le restant de ses jours…

Et si ça se trouve, l’un d’entre eux fut son aïeul !

500 000 qui profitèrent des grandes gelées de l’hiver 406 pour traverser le Rhin à pied et débarquer en Gaule (*).

La plus grande vague d’immigration que connut l’Empire romain, fort de 25 millions d'âmes –une paille à l’échelle de nos seuls 66 millions de compatriotes ! Des Vandales, autrement dit des cousins depuis lors, certains marchant jusqu'à l'Espagne pour s’établir ensuite en Tunisie. Des cousins, on vous dit ! Tandis que les autres faisaient souche chez nous (cela veut-il dire quelque chose ?) et inventaient ce qui n’existait pas encore : demain la France.

Des Vandales et des Francs, du norois Frekkr : hardi. Germains en fait, nos ancêtres, aussi sûrement que nos gaulois. Ah ces gaulois… Ancêtres mythiques, relevant d’une construction historiographique rudimentaire, qui supposait qu’avec eux, la France avait déjà implicitement conscience d’exister comme Nation… Une reconstruction a posteriori de l’Histoire française comme (grande) marche de la nation vers son accomplissement « français ». Il vaut la peine d’en décrypter les présupposés, tournant toujours autour de deux grands axes : celui de la constitution de la Nation autour des rois d’Ile-de-France puis de l’Etat centralisateur (autorisant la construction d’un thème national articulé par la notion de Peuple), celui de l’évolution de ce Peuple vers une République de citoyens façonnés par l’Instruction Publique (autorisant la construction d’un thème démocratique articulé par l’idée de Nation républicaine).

Le tout savamment localisé par le tracé d’une géographie impeccable, nous calfeutrant à l’intérieur de frontières prétendument « naturelles ». Mais en France moins que partout ailleurs il existe de frontières naturelles : les Alpes ouvrent de grands boulevards avec leurs vallées transversales, le Rhin, bien qu’impétueux, offre de multiples occasions de traversée et quant aux Pyrénées, elles sont elles-mêmes déchirées par de grandes coulées qui autorisent bien des passages (parlez-en aux Basques).

Quelles frontières naturelles, dès lors, et d’autant que, paradoxalement, le seul fleuve à « faire frontière » en France est le Rhône… Alors pensez : les Gaulois… Mais certes, quel bel outil de réconciliation nationale… Quel levier de fabrication et d’estampillage made in France, de cette France articulée secrètement par l’idée de l’Etat-Roi gommant toutes les coutumes et tous les droits… De sorte qu’écrire l’Histoire de France n’a jamais été, et ô combien nous le vérifions aujourd'hui, qu’écrire l’histoire de la Volonté de l’Etat-Roi français.

Joël Jégouzo

Image : anonyme. Dans cette troublante iconographie, remarquons que l’imaginaire de l’invasion barbare ouvre à l’idée de son retrait, une fois l’invasion repoussée (tôt ou tard). Sauf qu’en ce qui concerne cette invasion, nombre d’entre eux s’établirent dans le pays "envahi" pour y faire souche et enrichir le fait local de leur propre culture…

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