Du nouvel antisémitisme

« Cette interprétation de l’antisémitisme qui se veut à la fois décapante (ouvrir les yeux des honnêtes citoyens manipulés par les médias) et rebelle (sortir du « politiquement correct ») s’inscrit, en réalité, dans une vision extrêmement conservatrice de la société française et de ses enjeux actuels. Elle se fait le porte-parole d’un nouvel ordre moral, versant parfois dans un essayisme à connotation populiste, que l’on peut ramener à quatre traits majeurs.

Elle revêt d’abord une tonalité anti-élitiste et anti-intellectuelle : la crise du « modèle républicain » serait principalement due aux attitudes électoralistes et mercantiles de élites politiques française et de leurs alliés du champ culturel et scientifique (les « bien-pensants et les « bien-disants »).

Cet anti-élitisme est inséparable d’une croyance presque naïve au « quatrième pouvoir » des médias, qui par leur partialité dans la manière de traiter du conflit israélo-palestinien favoriseraient le renouveau de l’antisémitisme.

Elle véhicule , ensuite, une sinistrophobie récurrente : la gauche hexagonale aurait une responsabilité majeure dans ce développement de la judéophobie par son aveuglement et sa bienveillance à l’égard des « jeunes Arabo-musulmans » : la politique différentialiste qualifiée parfois de « discrimination positive à la française » (sic) aurait contribué à créer chez les jeunes musulmans un sentiment de puissance et d’impunité.

Elle reproduit, enfin, tous les clichés de l’orientalisme à propos de l’islam, présenté comme une religion hermétique à la citoyenneté et à la laïcité, parce que précisément ses fidèles ne seraient jamais parvenus à se départir de leur imaginaire ummiste , c’est-à-dire de leur croyance en une communauté musulmane mondiale et éternelle.

Mais plus grave encore, cette interprétation de la « nouvelle judéophobie » qui prétend dénoncer une communautarisation de l’espace public en vient à légitimer une conception communautariste rigide des enjeux socio-politiques. En effet, le soi-disant réveil des « instincts communautaires » chez les jeunes Arabo-musulmans tend à être érigé en grille de lecture unique, faisant fi des autres réalités sociologiques.

Nous sommes en présence d’une vision huntingtonnienne in societa – la théorie du « choc des civilisations » vulgarisée dans sa version franco-française…. » ( Vincent Geisser, La Nouvelle islamophobie)



1 commentaire:

Unknown a dit…

Chic ! Je viens d'un seul coup de comprendre enfin de que sont :
1) la judéophobie
2) le gâtisme

Ca valait le coup !