Au cours des années soixante, dans le cadre du mouvement pour les droits civiques, la montée des contestations face à la stratégie non violente de Luther King entraîne la création d’organisation radicales qui justifient l’autodéfense face une police raciste et violente. En 1966, Huey P. Newton et Bobby Seale fondent le Black Panther Party (BPP) à Oakland (Californie), avec pour mission initiale :
- de protéger les communautés locales des brutalités policières et du racisme.
- d’établir des cliniques pour les familles pauvres qui ne peuvent pas se soigner convenablement.
- de procurer de la nourriture aux écoliers.
L’audience croissante du BPP, grâce notamment au soutien de personnalités emblématiques comme Elridge Cleaver ou Angela Davis, consterne les forces de police. Ces dernières harcèlent les militants du BPP et leurs cherchent des chicanes afin de les discréditer. Désormais, les membres du BPP sont traqués et emprisonnés dès que possible. La stratégie des Panthers qui consiste à former des coalitions rassemblant les classes populaires, quelque soit la couleur ou l’origine des individus, inquiète beaucoup.
Entre 1966 et 1971, le BPP et la police se livrent une guerre de tous les instants. Presque tous les leaders des Panthers sont emprisonnés à un moment donné, souvent pour des délits mineurs, et certains meurent en prison. George Jackson, condamné à un an de prison pour un vol de 70 dollars. Transféré dans le quartier de haute sécurité de la prison de Soledad à San Quentin, il y crée une antenne du BPP et se consacre aussi son temps à l’écriture (Soledad brothers : letters from prison). Désormais, les autorités l'accusent du meurtre d’un gardien de la prison
Son cas intéresse alors Angela Davis. Cette militante du parti communiste et des Black Panthers, devient enseignante à l’Université de San Diego, en 1969. Elle milite à l’intérieur du parti communiste et des Black Panthers. Son activisme politique déplaît fortement au conseil directeur de l'université dont fait partie le gouverneur de l'État de Californie, un certain Ronald Reagan. Elle est congédiée avant même d'avoir pu donner son premier cours.
Celle qui se revendique comme "femme noire, communiste, révolutionnaire", ne se laisse pas impressionner et entame alors un bras de fer judiciaire avec Reagan. Le tribunal la rétablit dans ses fonctions, mais en juin 1970, l'Université l'expulse de nouveau. Désormais, Angela est surveillée de près par le gouvernement. Symbole du militantisme noir, elle devient vite une personnalité de premier plan aux Etats-Unis et au-delà.
Depuis plusieurs mois, Angela Davis participe à de nombreux comités de libération de militants des Panthers emprisonnés, comme les fondateurs du BPP, Huey Newton et Bobby Seale. Or, depuis février 1970, elle s'intéresse au cas George Jackson avec lequel elle entretient des relations épistolaires suivies (certaines de ses lettres figurent dans Soledad Brothers, Letters from prison). Davis étudie alors le dossier et considère qu'il n'existe pas de preuves contre Jackson et deux autres détenus, John Clutchette et Fleeta Drumgo, eux aussi accusés du meurtre d'un gardien de prison. A ses yeux, les autorités de la prison reprochent surtout aux trois hommes de prêcher la révolution auprès des autres prisonniers.
Dans le recueil de lettres Soledad Brothers, George Jackson dénonçait le racisme des autorités carcérales du pays. Pour Jackson, un grand nombre des délits reprochés à des Afro-américains s'expliquent avant tout par les conditions socio-économiques déplorables de la communauté noire. Angela Davis qui partage les analyses de Jackson s'engage alors dans une campagne active pour "libérer les frères de Soledad".
Le 7 août 1970, une prise d’otages menée par Jonathan Jackson, le frère du prisonnier, visant à libérer George Jackson tourne mal. Quatre personnes sont abattues (un juge, deux prisonniers et Jonathan) et trois autres sont grièvement blessées. Angela, en tant que membre du comité de soutien de George Jackson, est accusée par le FBI d’avoir procuré les armes qui ont permis ce coup de force. Activement recherchée, Angela Davis reste insaisissable pendant près d'un mois et son aura grandit. De nombreuses pancartes font bientôt leur apparition sur les murs et les portes : « Angela notre sœur, tu es la bienvenue dans cette maison ».
Arrêtée à New York, le 13 octobre 1970, de très lourdes charges pèsent sur elle puisqu'elle est accusée de meurtres et de séquestration. Elle risque donc la peine de mort. Davis demeure en détention provisoire pendant seize mois au « Women’s Detension Center » de New York. L’opinion publique internationale se mobilise en sa faveur à l'instar de John Lenon et Yoko Ono qui lui dédient la chanson « Angela » ou encore les Rolling Stones qui composent pour elle « Sweet Black Angel ».
Prévert lui écrit un poème. Durant sa captivité, un mouvement de soutien international se crée (Free Angela Davis Movement). Des manifestations rassemblent des foules très nombreuses dans de très nombreuses villes. A Paris, 100.000 personnes demandent sa libération (Aragon et Sartre se trouvent en tête du cortège).
Lors de son procès, la machination montée montée par le FBI fait long feu et l'accusée est acquittée le 4 juin 1972. Angela Davis devient une figure clef de la contestation. Universellement connue, elle multiplie les combats: pour la paix au Viêt Nam, l’égalité des femmes, contre le racisme et l’oppression au sein du National Alliance against racist and political oppression.
George Jackson, quant à lui, est assassiné à la prison de Saint Quentin, le 28 août 1971. Les gardiens plaident la légitime défense face à une tentative d'évasion supposée. L'autopsie démontre pourtant que Jackson a été abattu d'une balle dans le dos alors qu'il était probablement allongé…
J. Blottiere
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