Indian blues

Politique : « Les musulmans en Inde ont toujours été accusés d’être plus loyaux envers le monde musulman qu’envers l’Inde, et leurs liens sentimentaux supposés avec le Pakistan ont toujours été lus dans le cadre des ressources et des aspirations politiques de l’Islam mondial. Dans les années 80, la droite hindoue s’est particulièrement intéressée au flux de ressource issu du Moyen-Orient musulman au bénéfice des institutions religieuses et éducatives en Inde. Elle en a conclu que ce financement des musulmans indiens devait être surveillé et limité, et qu’il justifiait sa politique controversée de reconversion, surtout parmi les populations rurales et tribales les plus pauvres, prétendument poussées à la conversion par les forces de l’Islam mondial. Des reconversions de ce type ont été entreprises également dans les communautés chrétiennes indiennes et demeurent une plate-forme majeure pour la violence populaire et les stratégies politiques de la droite Hindoues. Lors de ses premières manifestations dans les années 80, cette bataille des conversions s’appuyait sur l’évocation de la puissance et de l’influence des forces des intérêts islamiques globaux , perçus comme les Troyens dissimulés dans le nombre relativement faible de musulmans au sein des communautés indiennes. Ainsi, pour dire les choses crûment, le nombre relativement faible des musulmans en Inde était perçu comme un masque dissimulant le grand nombre de musulmans dans le monde entier. Aujourd’hui cette image d’Islam militant et transnational est devenue presque naturelle dans les discours tenus sur le terrorisme islamique, en particulier depuis le 11-Septembre… » (Arjun Appadurai, Géographie de la colère)

Poético-socio-urbanistique : « Dans l’Inde contemporaine – où l’on estime que 700 millions de personnes n’ont d’autres solution que de déféquer en plein air – seules dix-sept des 3700 grandes et très grandes villes sont équipées d’un système de traitement des eaux usées avant leur rejet final. Un étude portant sur 22 bidonvilles indiens a montré que neuf d’entre eux n’avaient aucune latrine, et que dix autres n’en avaient que dix-neuf pour 102.000 résidents. Le réalisateur Prahad Kakkar, auteur de Bumbay, documentaire sur les toilettes de Bombay, raconta ainsi à un journaliste ébahi que la moitié de la population n’a pas de toilette où chier, alors ils chient dehors. Ça fait cinq millions de personnes. Si elles chient un demi kilo chacune, ça vous fait deux millions et demi de kilos de merde tous les matins… » (Mike Davis, Le pire des mondes possibles)

Économique : « A Mumbai, la politique indienne a ses propres façons de se déployer, comme dans d'autres Etats et région. Dans cette grande cité commerciale, l'histoire de la pureté nationale et de la préparation militaire est, comme toujours, quelque peu éclipsée par les nouvelles de Bollywood ou du cricket. C'est la ville de productions en espèces et en couleur et des innombrables rumeurs sur la mort mystérieuse de Harshad "Big Bull" Mehta, un banquier aux investissements frauduleux ; du moindre fait et gestes des Bachtans, la première famille du cinéma indien ; et de la reprise des poursuites criminelles contre le grand producteur de film et diamantaire Bharat Shah, accusé d'être lié à la mafia - autant d'élément qui nous rappellent qu'à Mumbai tout est soumis au système nerveux de l'argent, de la richesse, du glamour et du style… » (Arjun Appadurai, Géographie de la colère)





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