Le géant richissime au ventre mou...

Conflit et crise humanitaire en République Démocratique du Congo soit, depuis 1998, 5,4 millions de victimes, « un holocauste à bas bruit», dans le silence complice des nations...

Logique générale
: le devenir du Congo, tel qu’il se déploie aujourd'hui, se situe dans la continuité des grands mouvements de destruction et de reconstitution de l’État du XIXe siècle, ou de ce qui en tient lieu. A laquelle s’ajoute des dynamiques introduites par la colonisation et reconduites par les régimes indépendants. Par le biais de la guerre et de l’effacement du projet démocratique, cet enchevêtrement de dynamiques provoque une « sortie de l’État », c’est-à-dire l’émergence de formes de souveraineté, de régulation politique et sociale hors de l’État. Et pour le Congo, il s'agit belle et bien de chaos... Frontières : en matière de frontières, on distingue deux thèses. L’une défend l’idée selon laquelle les frontières des États africains sont des créations coloniales. L’autre prétend qu’une sorte d’intégration régionale serait en cours « par le bas ». Soit une vision simpliste de l’idée de limites frontalières dans l’histoire africaine et une méprise concernant la nature des frontières coloniales proprement dites. Par exemple, la RDC est l’exemple accompli d’un processus de délocalisation des frontières... Économie : du côté du gouvernement comme parmi les forces rebelles, soldes et récompenses se versent en espèces immédiatement « écoulables » sur le marché. Le trésor de guerre est constitué de métaux monnayés ou monnayables et de matières premières : les deux parties exploitent des mines aurifères et diamantifères ou des champs pétrolifères qui sont presque tous gagés et devinez qui en sont les bénéficiaires… De l’ État : cela fait un bon moment que l’État congolais s’est transformé en une satrapie informelle. Depuis le 2 août 1998, la guerre civile déchire la RDC et implique au moins six gouvernements africains (1). Étrange paradoxe qu’un État conquis par des hommes de main armés par les pays voisins, eux-même sous influence plus lointaine que se soit d'États ou de multinationales (Anglo-America, Standard Chartered Bank, De Beers....). Dans le contexte d’une politique de reconstruction de leurs propres États nationaux, les régimes du Rwanda, du Burundi et de l’Ouganda s’efforcent de modifier la donne régionale selon une logique à trois dimensions. Celle-ci vise d’abord à affaiblir durablement l’État (plus que fantomatique) du Congo en affaiblissant la souveraineté sur d’importantes régions de son territoire. Ensuite, elle tend à démembrer l’espace congolais en autant de fiefs économiques différenciés renfermant chacun des richesses spécifiques (minéraux tels que le colombo-tantale, bois, plantations, etc.) que l’on exploite par le biais d’accaparements et de franchises diverses. Enfin, elle vise à instrumenter le désordre ainsi créé en développant une atomisation sociale et en décomposant les forces politiques locales pour imposer une tutelle informelle et distancé sur ces régions. Géographie : dès lors, conflits locaux et régionaux s’interpénétrent, tandis que des guerres incessantes opposent factions, ethnies et lignages, à l’intérieur d’un cadre désormais régional. Contrairement aux trois autres pays africains de même taille (Afrique du Sud, Nigeria, Soudan), le Congo présente désormais le visage d’un large espace ouvert, élargi à plusieurs États, écartelé entre une multiplicité de forces, et où le pouvoir central peine à tenir le territoire. A la difformité de l’État répond l’éclatement interne. Une partie du territoire regarde vers l’Afrique australe ; une autre a ses énergies intérieures dissipées par les désordres des Grands Lacs ; une autre encore s’enfonce de plus en plus dans le faisceau Soudan - Oubangui-Chari, tandis qu’un couloir s’oriente vers l’Atlantique et les anciens pays du royaume du Kongo. Sur fond de violence armée, de forte dépréciation des monnaies et de trafics, des alliances aux contours changeant s’entrecroisent et se défont. Des coalitions de circonstance se forment à l’échelle régionale. Mais aucune force n’accumule suffisamment de puissance pour dominer durablement toutes les autres. Partout émergent des lignes de fuite dont on ne voit pas la reterritorialisation prochaine...

(1) Derrière ces pays, les véritables commanditaires étaient les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, la Belgique, l’Australie et l’Afrique du Sud. D’ailleurs, il suffit de lire le Rapport des Experts de l’ONU pour s’en assurer : les compagnies principales bénéficiaires de ce pillage en règle sont pour la plupart anglaises, américaines, belges ou sud-africaines. Parmi elles ont retrouve l’Anglo-Gold Ashanti (basée à Londres), Barrick Gold (basée au Canada), Malta Forrest du Belgo-Neozélandais George Forrest (basée aux îles vierges britanniques et en Belgique – accessoirement, George Forrest est le Consul honoraire de la France à Lubumbashi), Anvil Mining (basée en Australie), Boss Mining (de l’anglo-zimbabwéen Billy Rautenbach), reprise récemment par l’Israélien Dan Gertler, etc.

Inspiration

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